L’Organisation internationale du travail a publié coup sur coup deux rapports peignant un tableau alarmant du niveau de protection des travailleurs dans le monde. Plus de 27 millions de personnes sont victimes de travail forcé, et 70% des salariés sont exposés aux dangers liés au changement climatique.
À qui profite le travail forcé ?
Si ce phénomène est souvent abordé sous l’angle des droits humains, le Bureau international du travail (BIT) s’est penché sur sa dimension socio-économique, indispensable pour comprendre les mécanismes de l’esclavage moderne.
Les résultats sont stupéfiants : d’après l’institution, le travail forcé génère 236 milliards de dollars chaque année dans le monde. Pire, ce chiffre a fortement augmenté depuis la dernière étude du BIT sur le sujet il y a dix ans car le nombre de victimes est en hausse, de même que le bénéfice extorqué à chacune d’entre elles.
« En 2021, 27,6 millions de personnes étaient en situation de travail forcé, soit 3,5 personnes sur mille dans le monde »,
expose le rapport. Ces données recouvrent des situations très diverses : chantage au licenciement, salaires inférieurs au minimum légal, retenues de salaire abusives, etc.
Les formes les plus graves – isolement forcé, privations, violences – sont minoritaires. Parmi les victimes, 6,3 millions de personnes subissent une exploitation sexuelle, le type de travail forcé le plus tristement lucratif (plus de 27 000 dollars par victime et par an).
Face à ce fléau, les capacités d’action progressent lentement. Une directive européenne, imposant un « devoir de vigilance » aux entreprises quant au respect de l’environnement et des droits humains dans l’ensemble de leurs chaînes de production, vient de voir le jour.
Mais le temps qu’elle soit transposée dans le droit national,
« il ne se passera rien de concret avant au moins trois ans »,
tempère Branislav Rugani, secrétaire confédéral au secteur international de FO.
Manque de protections concrètes
En matière de protection des travailleurs contre les dangers du changement climatique, États et institutions internationales semblent pareillement à la traîne.
Les réponses peinent à émerger, alors que 70% de la main-d’œuvre mondiale est exposée à des risques accrus, selon un deuxième rapport du BIT paru en avril 2024.
Selon l’étude, 2,4 milliards de salariés sont exposés à une chaleur excessive au travail, et celle-ci est à l’origine de 22,8 millions d’accidents du travail et de 19 000 décès chaque année.
Chez les travailleurs exerçant en extérieur, le nombre de morts liées à la pollution de l’air s’élève à 860 000. Les rayons solaires ultraviolets, responsables entre autres de cancers, concernent quant à eux 1,6 milliard de salariés.
Afin d’œuvrer à une meilleure protection des travailleurs face à ces risques, Branislav Rugani exhorte l’OIT à ne pas en rester au plaidoyer.
« Lors des négociations qui ont abouti à un document de référence sur le changement climatique et le travail, les organisations syndicales ont voulu y inscrire des mesures concrètes contraignant les gouvernements à mettre en place des protections pour les salariés. Les employeurs nous en ont empêché. Aucune pression ne leur a été mise. Et au final, le document n’est donc absolument pas contraignant. »
Force Ouvrière continue de lutter à l’échelon international pour que de réels moyens soient alloués à la prévention des risques qui pèsent sur la main-d’œuvre partout dans le monde.
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